Tracey Rose
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Née à Durban (ZA). Vit et travaille à Durban (ZA).
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The Black Paintings : dead White Man
2012
Vidéo, couleur, son stéréo. durée: 13' Acquisition: 2013 |
Tracey Rose est une artiste sud-africaine, née à Durban, ville où elle est retournée s’installer après s’en être éloignée. Elle a suivi notamment sa formation artistique à l’Université du Witwatersrand à Johannesburg et s’est fait rapidement connaître internationalement pour ses performances, ses installations vidéo et ses photographies. Les œuvres de Tracey Rose sont violentes, mystiques et indéfectiblement attachées au réel. Elles sont violentes car le monde l’est, car l’histoire humaine l’est ; ce n’est pas un choix. Le travail performatif, de vidéo et de photographie de l’artiste prend presque toujours source dans son corps ou dans des corps. Le corps est ce qui ne ment pas, qui subit le poids généalogique du passé atroce. Ce passé le déforme, le transforme, le hante, le fait hurler, enfler, danser aussi. L’œuvre de Tracey Rose est cette transe historique, cérémonie de commémoration permanente, défi à l’oubli, haine de la fameuse résilience. Le corps et l’esprit de l’artiste sont ouverts, en permanence, à la possession — l’appellent-ils, la subissent-ils ? C’est l’histoire de toutes les dominations, de toutes les soumissions, de tous les meurtres, de tous les corps racisés, de tous les viols, qu’il faut entendre. L’histoire de l’apartheid bien sûr, mais d’autres histoires, plus anciennes ou plus contemporaines. Dans The Black Paintings : Dead White Man, une vidéo de 13 minutes, c’est d’abord l’ultrason agonisant sorti de la gorge de l’artiste qu’il faut distinguer. À cela se superpose la prononciation du nom des morts, victimes célèbres — martyrs politiques ? Et puis le mot « white » (« blanc ») répété jusqu’à l’essoufflement. Et la boucle reprend. Et que voit-on ? D’abord le lieu du culte, l’autel de carton peint, où les noms sont répétés encore. Puis la prêtresse qui entre, une prêtresse païenne et démone : elle nous tourne le dos, le corps gris, brun, peint, boueux, ironiquement adamique. Commence une danse dont on ne sait si elle est lamentation ou exorcisme. À la fin, elle se retournera, nous fera face, et nous verrons : qu’elle porte la vie. Ce corps qui nous tournait le dos est aussi mémoire, ancrée dans le travail de Rose, de Sawtche Baartman (voir Venus Baartman, 2001), dite la Vénus Noire ou Hottentote, avec laquelle l’artiste partage des origines khoïsanes. Mémoire de Baartman dans sa cage, de ses ossements rendus par la France à l’Afrique du Sud en 2002, mémoire de la colère de Rose qui a dilaté sa chair pour la faire revivre. Lucie’s Fur Version : Adam and Yves est une photographie plus ancienne de Tracey Rose, issue d’une vaste série. À cette époque, Rose travaille sur les mythes entourant l’origine de l’humanité : elle cherche des « contre preuves » et des manières de subvertir les dogmes religieux, les théories scientifiques de l’évolution et les conventions de l’Histoire de l’art. Le titre de l’œuvre fait référence à « Lucy », le surnom du fossile de l’espèce éteinte Australopithecus afarensis découvert sur le site de Hadar en Éthiopie en 1974. C’est la question, fort discutée, de la place de Lucy dans l’évolution humaine qui a poussé Rose à produire les allégories africaines de la série « Lucie’s Fur » qui fonctionnent contre les typologies raciales et contre l’imagerie biblique. Rose relit ainsi l’Annonciation à travers plusieurs photographies puis, avec Adam and Yves, propose une image des géniteurs de l’espèce humaine qui refuse la prétendue et imposée sagesse universelle de la famille nucléaire. Eva Barois de Caevel |
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