La partie
1999
Vidéo, couleur, sonore
Durée : 95'
Acquisition: 1998
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Par le biais du langage, objet et sujet, Pierre Bismuth s’intéresse à la question de la transmission – «qu’est-ce qui est transmis et comment ?» – et à la question de la réception d’un événement, d’un film. «Ce qui m’intéresse est ce qui se communique en dehors des actes conscients de communication», dit-il.
The Party est une vidéo qui présente la comédie de Blake Edwards avec Peter Sellers, dans une version muette, sans dialogue ni musique. Sous l’image projetée s’inscrivent dans une simultanéité toute relative les dialogues, mais aussi un descriptif de la musique et des différents bruitages du film, tels qu’ils sont entendus au casque par une personne qui n’a jamais accès aux images. «Ce qui m’intéressait là, c’est que ce commentaire a la même valeur que le film. N’importe qui, à partir du moment où il décrit ce qu’il perçoit, produit une information qui fait autant autorité que le film lui-même. C’est pour moi une manière d’interroger la valeur que l’on porte à ces choses soi-disant construites, à l’art notamment. Je cherchais à donner de l’autorité à un acte qui a priori n’en a pas et en faire perdre à une chose qui généralement en a.» Pierre Bismuth met en exergue et joue avec les mécanismes qui composent un événement, un film, un journal, une émission de télévision.
Il fractionne et spatialise les différentes composantes du film, le son et l’image. La bande son transcrite sous la forme d’un sous-titrage par la personne portant un casque est un élément perturbateur, tout comme l’est l’acteur Peter Sellers dans le film. Insolite, le bruit du clavier l’est à double titre, car il demeure le seul son audible et l’unique élément permettant de faire le lien entre le texte et l’image. Il est en décalage par rapport aux attentes du spectateur. Dans cette œuvre, le processus de retranscription des dialogues implique un décalage et des distorsions entre ce qui est vu et ce qui est lu. Procédant de la sorte, Pierre Bismuth questionne ce qui fait autorité dans une œuvre.
Pris entre deux opérations – suivre les scènes du film original, en lire les dialogues, ou encore les écouter au casque -, le spectateur est toujours confronté à un véritable travail de décryptage. Renvoyé à sa propre subjectivité, il doit choisir son mode de réception et de compréhension de l’œuvre. Considérant l’art comme un terrain «d’investigations», Pierre Bismuth permet au spectateur de faire de même et lui offre ainsi une singulière liberté.
Line Herbert-Arnaud
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