Née en 1967 à Belo Horizonte (BR)
Vit entre Copenhague (DK), New York (US) et Rio de Janeiro (BR)
2008 - 2009
Projection de diapositives, noir et blanc, couleur, voix off de Charlotte Mc Gowan-Griffin, son de Jasmine Guffond
Durée : 20’
Acquisition: 2010
Associant dans son travail des images préexistantes et des fragments de narrations, Tamar Guimarães envisage les documents d’archives comme des palimpsestes, objets qui se construisent par destruction et reconstruction successive, tout en gardant l’historique des traces anciennes. En ce sens, Tamar Guimarães considère les récits historiques comme des « espaces » permettant de spéculer sur le présent.
A Man Called Love, (2008), œuvre constituée d’une projection de diapositives et d’une bande sonore, restitue l’histoire vraie de Francisco Candido Xavier alias Chico Xavier (1910 – 2002), medium brésilien le plus célèbre et le plus prolifique du XXe siècle, qui sous l’influence des « esprits » produisit plus de quatre cents livres de sagesse et de spiritualité. Chico Xavier popularisa la doctrine « spirite », définie pour la première fois par Allan Kardec dans l’introduction du Livre des Esprits, publié en 1857. Cette doctrine se fonde sur l’existence, les manifestations et les enseignements des esprits, le plus souvent d’humains désincarnés.
Utilisant la psychographie, l’écriture des esprits par la main d’un médium, il affirma voir, en 1931, son « mentor » spirituel sous la forme d’un esprit prénommé Emmanuel. Guidé par cet être invisible, Chico Xavier publia son premier livre en juillet 1932, Le Parnasse d’outre-tombe, recueil de soixante poèmes attribués à neuf poètes brésiliens, quatre portugais et un anonyme, tous disparus. Cet ouvrage de haute poésie, produit par un modeste caissier, qui le signa du nom d’auteurs décédés, provoqua l’étonnement. Chico Xavier reçu d’innombrables hommages tant du peuple que des organismes publics.
Pour Tamar Guimarães, la vie de Chico Xavier permet d’aborder les questions liées aux relations raciales et aux malaises sociaux au Brésil lors de l’ère Vargas des années 1930–1950 et de la dictature militaire de 1964 à 1985, périodes au cours des quelles Chico Xavier connu sa plus grande popularité. Ainsi, elle observe un lien entre le développement du Spiritisme au Brésil et les utopies socialistes émergentes puis la distanciation subséquente de celles-ci lors de la dictature. Cependant, A Man Called Love fait ressortir les failles sous-jacentes de la pratique « spirite » de Chico Xavier qui révèle un entrelacement entre la dictature militaire et la résistance.
Tamar Guimarães restitue des images d’archives publiques de pratiques spirites de Chico Xavier produites dans les années 1930 et 1940 au Brésil ainsi que des images de protestations face au régime militaire dans les années 1960. Elle utilise la biographie comme point de départ pour explorer les interstices entre art et documentaire. A Man Called Love est plus qu’un simple documentaire expérimental. Dans ce diaporama si étonnant qu’il semble parfois être une fiction – alors qu’il est fondé sur des faits réels – l’artiste évoque des processus historiques et sociopolitiques, réincarnés par Chico Xavier de façon explicite ou implicite.
Texte publié dans le journal édité à l’occasion de l’exposition Les vigiles, les menteurs, les rêveurs (curateur : Guillaume Désanges) présentée au Plateau/Frac Île-de-France du 16 septembre au 14 novembre 2010.